Pourquoi la quête de souveraineté numérique sur Internet menace l’hégémonie américaine


Début novembre, la Chine tenait en grande pompe sa 10e Conférence mondiale de l’Internet (World Internet Conference, WIC). Mondiale, vraiment ? Cet événement était en fait la réplique du président chinois, Xi Jinping, à la 18édition du Forum sur la gouvernance de l’Internet (Internet Governance Forum) qui avait eu lieu un mois plus tôt au Japon, sous l’égide des Nations unies. Ces deux rendez-vous internationaux en disent long sur la bataille qui se joue autour de l’avenir du « réseau des réseaux ». Et reposent la sempiternelle question : à qui appartient Internet et qui le gouverne ? La réponse est simple : personne ! Nul n’en est propriétaire.

La gouvernance d’Internet, autrement dit la définition de ses grandes orientations technologiques, fonctionne comme une copropriété mondiale mais… sans propriétaires. Il y a seulement les parties prenantes que sont les gouvernements, le secteur privé (les entreprises), la société civile (dont les internautes) et des communautés techniques et universitaires, tous censés avoir leur mot à dire sur la gestion « multipartite » du Net, ses protocoles et leurs évolutions.

A l’heure où explosent le très haut débit, la mobilité, la cybercriminalité, la blockchain ou encore l’intelligence artificielle (IA), se mettre d’accord au niveau international devient crucial. Internet, dont la vocation est d’être universel et ouvert, est pourtant aujourd’hui au bord de l’implosion. Et le chef d’orchestre du réseau, la société américaine Icann (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers), est plus que jamais contesté. La Chine fait pression pour changer totalement la gouvernance de l’Internet afin de renforcer le rôle des Etats.

Contraintes techniques contre pressions politiques

A but non lucratif et reconnue d’utilité publique, l’Icann est née il y a un quart de siècle en Californie. C’est elle qui attribue et administre les adresses et noms de domaine (les « .com », « .net », « .org », « .fr », « .info », etc.), grâce à seulement treize serveurs informatiques, dits « racines », répartis sur la planète. Une autre société américaine, Verisign, est, elle, cotée en Bourse à New York depuis vingt-cinq ans. Elle opère pour l’Icann deux serveurs importants (« . com » et « . net », notamment). Pour assurer une « gouvernance multipartite » d’Internet, l’Icann tient, en général, trois réunions annuelles et fonctionne selon un modèle dit « ascendant » (bottom up), lequel consiste à consulter la communauté internationale de l’Internet (techniciens, universitaires, organisations, gouvernements…) avant toute décision.

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